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 « Guess who just got back today? » | feat. Orlando

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Gaël Costigan

My Own Private Idaho

Gaël Costigan

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« Guess who just got back today? » | feat. Orlando  _
MessageSujet: « Guess who just got back today? » | feat. Orlando    « Guess who just got back today? » | feat. Orlando  EmptyDim 19 Sep - 18:46


« Guess who just got back today? » | feat. Orlando  9pm2w7 « Guess who just got back today? » | feat. Orlando  Mac7r9 « Guess who just got back today? » | feat. Orlando  2r4j0hy
« I'm gonna keep what counts
& throw away what doesn't really matter »

Le paysage défilait par la fenêtre du vieil autobus, légèrement couverte d'une fine couche de buée . Le visage sensiblement basculé contre la vitre froide, Gaël sortait doucement d'un sommeil qui s'était avéré plus que nécessaire. Après avoir passé plusieurs longues heures dans un train reliant New-York à l'État du Wyoming, il se trouvait désormais dans un bus qui le conduirait jusqu'à la ville si chère à son coeur, traversant pour cela l'Idaho dont la verdure et le paysage si typique s'offraient enfin à ses yeux. Le voyage avait été long, terriblement long et la promiscuité qui le reliait à son voisin légèrement corpulent était telle qu'il avait du jouer le contorsionniste à plusieurs reprises afin de trouver une position un tant soit peu confortable. A plusieurs reprises, le jeune homme avait du se lever afin d'effectuer quelques allers-retours, se dégourdir les jambes et faire disparaître cette horrible sensation d'engourdissement qui lui paralysait les fesses. Il savait que l'avion aurait été beaucoup plus simple, mais il n'avait pas les moyens de se payer un tel luxe et il était hors de question de demander à son père de subvenir à ses besoins en ces temps difficiles. D'ailleurs, il filtrait ses appels depuis quelques jours déjà, le renvoyant vers sa boite vocale de façon systématique. Il n'était pas prêt à l'affronter, à lui mentir ni encore moins lui avouer la vérité. De plus, il savait qu'aussitôt son secret dévoilé, il verrait débarquer son père à Ruby Creek Falls pour lui remettre les idées en place, une chose qu'il n'espérait jamais voir se réaliser. Pour l'instant, il ne comptait que sur le soutien de son frère aîné et de sa mère. Bien que tous deux ne soient pas encore au courant de ses intentions de rester auprès d'eux plus que le temps initialement prévu -les vacances- Gaël savait au fond de lui que ni Orlando ni sa mère ne le jugerait ou lui reprocherait quoique ce soit. Ils l'avaient toujours soutenu et s'il existait bien au monde deux personnes en qui le jeune homme avait une confiance aveugle, c'était eux.

Le soleil commençait à percer les nuages, plongeant les champs et les étendues vertes dans une auréole jaunâtre aux allures féériques. Le paysage prenait doucement vie sous ses yeux, comme si chaque élément, chaque brin d'herbe se réveillait peu à peu au contact brûlant du soleil. Gaël se souvenait avec une pointe de nostalgie du jour où il avait effectué le chemin inverse. Orlando avait insisté pour le conduire à la ville voisine afin de lui éviter un trajet en bus mais aussi, secrètement, pour avoir quelques minutes supplémentaires à passer avec son jeune frère. Ils avaient passé le trajet à écouter des vieux classiques de rock, leurs préférés, sans jamais aborder la future vie du cadet. Orlando avait su deviner sa peur de l'inconnu et le sentiment d'incertitude absolue qui planait au dessus de lui. C'était l'une de ses grandes qualités, sa capacité à lire en lui comme dans un livre ouvert. Aussi, il s'était efforcé de parler de tout, de rien, mais surtout de ne jamais évoquer le futur. Un sujet terrorisant pour Gaël. Ce trajet, le jeune homme l'avait aussi vécu difficilement pour une toute autre raison, tandis qu'il voyait s'effacer derrière lui le paysage si rassurant et familier de Ruby Creek Falls, Gaël n'avait qu'un visage en tête, celui de Floyd, son petit-ami. La veille, leur dernier rendez-vous près du Garnet Lake -où ils aimaient se retrouver- avait eu des allures d'adieux, bien que ni l'un ni l'autre n'ait jamais évoqué l'éventualité de ne plus se revoir. Floyd était resté semblable à lui-même, bavard et intenable, quand à Gaël, il s'était montré extrêmement silencieux, son esprit trop embrumé pour que sa gorge ne se dénoue. Lorsqu'à la nuit tombée chacun s'apprêtait à rentrer chez lui, il lui avait demandé s'il serait là le lendemain, à la Gare, mais Floyd n'avait rien répondu, pour une seule et unique fois depuis le début de leur relation quelques mois plus tôt, Gaël avait fait face à un petit-ami muet. Incapable de lui apporter la moindre réponse. Il avait alors attendu le lendemain, de longues minutes, dévisageant chaque personne sur le Quai en espérant y distinguer celui si atypique du garçon dont il était fou amoureux, parfois il lui semblait apercevoir sa tignasse dans la foule ou même d'entendre son rire si communicatif, mais ce n'était que le fruit de son imagination. Il avait tant espéré que son absence n'en fut que plus douloureuse. Il trouva néanmoins la force d'enlacer Orlando une dernière fois avant de partir, le remerciant de l'avoir emmené, et c'est seulement après s'être retourné deux ou trois fois supplémentaires qu'il était monté dans ce train. Celui qui le conduirait vers une nouvelle vie, une vie effrayante, à l'opposé de tout ce qu'il avait connu jusqu'ici. Même lorsqu'il fut assis à sa place, son regard ne quitta pas le Quai qui se vidait peu à peu au fur et à mesure que les passagers n'entraient dans le train. Les lèvres pincées, il espérait encore... Mais le train finit par démarrer et au bout de quelques secondes, la Gare ne fut qu'un point sombre au loin.

Gaël était tant immergé dans ses souvenirs qu'il ne sentit pas le bus s'immobiliser. Une légère secousse le sortit brusquement de ses songes et il leva les yeux pour découvrir l'occupant du siège voisin penché sur lui, une main sur son épaule. D'une voix tintée d'un gros accent qu'il devina typiquement Australien, il lui signala la fin de leur voyage. Le jeune homme le remercia brièvement et se releva enfin, frottant ses mains sur son jean sombre avant de tendre le bras pour saisir son sac de voyage et sa guitare qu'il avait refusé de mettre dans la soute de l'appareil, privant deux ou trois personnes d'un compartiment pour leurs propres affaires. Le bus se vidait doucement, le plongeant dans un silence étrange qui contrastait vivement avec le brouhaha qui l'avait précédé. Gaël se sentait encore légèrement engourdi par sa sieste improvisée et inconfortable, il ne rêvait que d'une longue douche glaciale pour lui redonner un coup de fouet et se demandait s'il aurait le temps de fumer une ultime cigarette avant que son frère n'arrive. Certes il ne remettait pas en doute la ponctualité d'Orlando, mais il n'espérait tout de même pas le voir déjà sur place, prêt à l'accueillir. Un léger sourire se dessina sur ses lèvres lorsqu'il repensa à sa courte conversation téléphonique avec son frère quelques heures plus tôt, lorsqu'il l'avait prévenu au dernier moment de son retour au bercail. Sa voix s'était brisé en un léger éclat de rires avant qu'il ne lui lance un prévisible « Je t'avais dit que je te manquerai, p'tit frère! » . Il n'avait pas eu besoin de le convaincre longtemps, à peine Gaël eut-il le temps d'évoquer son retour qu'Orlando lui proposait de venir directement le prendre à la Gare de bus, à la sortie de la ville. Prévoyant que l'accumulation d'heures passées assis dans un train puis un autocar lui seraient fatale, Gaël n'avait pas rechigné, s'il pouvait éviter de marcher une bonne heure, il n'allait pas se priver d'un tel luxe.

Lorsqu'il descendit les deux marches de l'autobus, le jeune homme leva les yeux et fixa l'horizon en quête d'un visage familier. L'air tiède lui caressa la peau et il reconnut immédiatement le parfum si rassurant de sa ville natale. Il flottait dans l'air comme un doux arôme printanier, le paysage était calme comme si le temps s'était arrêté et immédiatement Gaël se demanda de quoi pouvait avoir l'air le reste de la ville après les catastrophes qui l'avaient frappé récemment. Cette partie semblait encore épargnée, aussi intacte que dans ses souvenirs, mais il redoutait de voir les dégâts causés sur les lieux de son enfance, de voir d'immenses bulldozers gâcher le paysage si cher à son coeur. Il s'empressa néanmoins de chasser ces idées de son esprit et vint se placer derrière un couple qui attendait de pouvoir récupérer leurs bagages à l'arrière du bus. L'image amusait le jeune homme : pourquoi tout le monde se mettait-il en file indienne pour récupérer leurs bagages? comme si leurs valises avaient pu disparaître entre deux États, à l'anglaise. Gaël ne s'en faisait pas tant pour la sienne, il ne possédait rien de précieux si ce n'est les quelques photos qu'il gardait constamment dans ses affaires. Tout le reste, son carnet, sa guitare et son portefeuille étaient près de lui. Le reste importait peu. Il gardait également à son poignet un bracelet indien fait de cuir et de lacets qu'il portait depuis l'âge de 12 ans. Il lui avait été offert par une jeune indienne qu'il avait croisé un après-midi où la chaleur était presque suffocante, au bord du Lac. Les deux enfants étaient resté ensemble à s'amuser jusqu'à ce que la nuit tombe, sans même échanger leurs prénoms. La fillette lui avait alors offert avant de partir ce bracelet qui, même s'il ne payait pas de mine à première vue, semblait avoir une signification particulière au sein de la communauté dont faisait partie sa nouvelle amie. Gaël ne l'avait plus jamais retiré depuis.

Lorsque tout le monde eut récupéré ses bagages, Gaël s'avança vers la soute et extirpa l'unique valise s'y trouvant encore : la sienne. Son sac et sa guitare sur l'épaule, il saisit fermement la poignée de sa valise et s'éloigna de la bordure du trottoir afin d'avoir une vue plus dégagée de la route d'où viendrait très certainement Orlando. Au fil des minutes, le jeune homme sentait une pointe d'excitation grimper en lui. Il réalisait seulement à quel point son frère lui avait manqué au cours de ces 18 mois passés à l'autre bout du pays. Il espérait que rien n'aurait changé, que le temps se serait figé en son absence et qu'il n'aurait pas trop de choses à rattraper. Bien sûr, il savait qu'Orlando aurait des centaines d'histoires à lui raconter, notamment celles concernant ses nombreuses conquêtes. Il avait toujours été un infatigable prédateur et Gaël ne comptait plus les femmes qu'il avait vu défiler au bras de son aîné, ne prenant jamais le temps de retenir leurs prénoms tant la longévité de leur histoire amoureuse était aléatoire. Les récits piquants de son frère avaient toujours fait le bonheur de Gaël qui aimait l'écouter narrer ses prouesses. Lui qui à l'opposé, n'avait rien d'un homme à femmes. Certes il aimait le flirt, le jeu et tout ce qui précédait une relation, mais il aimait par dessous l'excitation d'une nouvelle histoire, les premières fois et tous les petits détails qui rendaient toutes ses relations jusqu'ici, particulières. Gaël aimait la sincérité, aussi, il ne s'imaginait pas coucher avec une femme, ou un homme, et partir le lendemain comme un voleur, sans jamais donner de nouvelles. Il admirait la force de son frère qui savait clairement montrer à ses conquêtes qu'il n'était pas homme à marier. Mais lui n'était pas attiré par la frivolité.

Glissant une main dans la poche de son jean, Gaël en extirpa l'ultime cigarette trônant encore dans son paquet et l'alluma aussitôt, se délectant enfin d'une bouffée de nicotine salvatrice. Le trajet avait été un vrai supplice et parfois ses jambes s'étaient agité nerveusement, comme l'auraient fait celles d'un junkie. Il détestait cette sensation de dépendance mais rien n'y faisait, même ces cochonneries de chewing-gums à la nicotine n'avaient jamais suffit à le faire arrêter sa nouvelle drogue. Il tira dessus longuement, si bien qu'il fut sûr de la terminer d'ici une ou deux minutes. Le soleil lui piquait légèrement les yeux, aussi, il retira sa paire de ray-ban de l'encolure de son t-shirt et la glissa sur son nez, se protégeant des rayons brûlants. Et c'est alors qu'il relevait les yeux vers sa droite qu'il aperçut le véhicule de son frère. Son tacot n'avait pas bougé, si ce n'est qu'il devait avoir quelques milliers de kilomètres en plus à son compteur. Gaël fut d'ailleurs surpris de le voir encore rouler, se souvenant qu'Orlando avait commencé à le conduire avant même d'avoir officiellement son permis, en bon ado excité par l'indépendance qu'il était. Écrasant son mégot sous sa semelle droite, Gaël se redressa légèrement, comme pour se grandir et se donner une allure plus virile. Il avait toujours cherché l'admiration de son frère, ou ne serait-ce qu'un semblant de fierté, aussi aujourd'hui encore il espérait que celui-ci ne reconnaisse qu'il avait changé, gagné en maturité, même si lui-même n'en était pas si sûr. La voiture d'Orlando fit une halte quelques mètres plus loin afin de laisser traverser quelques piétons et Gaël devina que son élan de courtoisie n'était du qu'au micro-shot que portait l'une des passagères de son bus qui cherchait désormais à rejoindre un coupé Ford couleur émeraude où un homme aux cheveux poivre et sel l'attendait au volant. Un léger rictus se dessina sur ses lèvres tandis qu'il vit le regard de son frère suivre la concernée du regard avant de reprendre sa route. Quelques mètres de plus et il fut garé à l'endroit où se trouvait initialement le bus, désormais en route vers l'État voisin. Gaël attendit que son frère ne le remarque, et lorsque ce fut le cas, son sourire se fit plus immense encore. Orlando coupa le moteur, ouvrit la portière et marcha naturellement vers son cadet, un léger sourire aux lèvres.

« Je savais que tu me ferai attendre! » plaisanta Gaël lorsque son frère fut plus près de lui. Il en profita pour le dévisager, reconnaissant ses traits désormais plus dessinés, ses grands yeux bleus et son sourire un brin canaille. Ses cheveux bruns étaient nettement plus courts qu'auparavant, sans doute avait-il cherché à se débarrasser de ces boucles infernales dont il se plaignait sans arrêt lorsque ses mèches brunes atteignaient encore sa nuque. Le simple t-shirt blanc qu'il portait et dont les manches étaient légèrement relevés laissait entrevoir son corps suffisamment épais pour le faire passer pour une vulgaire crevette et Gaël se surprit encore à blâmer l'injustice qui avait frappé sur son corps frêle et si peu viril tandis que son frère avait hérité d'une ossature nettement plus avantageuse. Lorsqu'il fut face à lui, tous deux semblèrent considérer la question de l'étreinte. Devaient-ils s'enlacer au risque de passer pour tout autre chose que deux frères se retrouvant enfin? ou bien se serrer la main, optant pour la solution neutre et suffisamment virile? Mais Gaël n'était pas de ceux qui portaient une quelconque attention aux clichés et à l'ambiguïté d'une étreinte, aussi, il fit le premier pas et après avoir sourit à son aîné, l'enlaça suffisamment pour lui manifester sa joie de le retrouver enfin.
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Orlando Compton

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MessageSujet: Re: « Guess who just got back today? » | feat. Orlando    « Guess who just got back today? » | feat. Orlando  EmptyLun 27 Sep - 20:17

« Orlando, lève-toi. »

Ce n’était pas la première fois qu’Arlene passait la tête par la porte, mais le musicien ne semblait pas avoir remarqué ses appels jusque-là. Émettant un grognement sourd, il rabattit son oreiller sur sa tête et ignora le bruit des casseroles dans sa cuisine.
Bon Dieu ! Il en avait déjà marre de l’omniprésence de sa mère. Il avait acquis un appartement pour cette seule et unique raison : pouvoir agir comme bon lui semblait, sans craindre d’être réveillé ou rappelé à l’ordre par la voix maternelle. Oh, bien sûr, il savait qu’elle faisait cela pour son bien, mais il allait avoir vingt-six ans d’ici quelques mois, il était grand temps qu’elle le laisse mener sa vie comme bon lui semblait. Ce serait probablement chose faite si le drame n’avait pas eu lieu, fin juin, forçant le jeune homme à cohabiter avec sa mère. Il ne pourrait pas la forcer à trouver un autre logement, encore moins à le lui suggérer alors il subissait ses bavardages inutiles, les ragots qu’elle entendait à son boulot et le résumé de ses conquêtes d’un soir ou plus. Il y avait longtemps qu’il ne s’était plus intéressé à la vie affective de sa mère. Le dernier dont il se souvienne – et pour cause – c’était James Costigan, le père de son demi-frère. Il avait trouvé qu’en emménageant seul, un équilibre naturel s’était installé. Il en était d’autant plus ravi de voir sa mère. Ne pas entendre ses discours interminables tous les jours avait rendu sa vie plus facile et il ne se plaignait plus de ceux-ci lorsqu’il lui rendait visite dans la maison de leur grand-mère maternelle. Cela avait duré quelques années et puis ils étaient revenus à leur mode de vie habituel. Orlando avait beau savoir que ce n’était que pour un temps, que sa mère déménagerait dès qu’Amethyst Mews serait reconstruit et capable de reprendre les familles sinistrées, il commençait quand même à en avoir ras-le-bol. Seule lumière au tableau : le retour tant attendu de son cadet, le brillant étudiant qui vivait à New York, la plupart de l’année. Si ça ce n’était pas un petit veinard, s’était souvent dit Orlando, au début du moins, parce qu’il n’enviait en rien la relation que Gaël entretenait avec son père. Celui-ci était constamment sur son dos, à lui faire entendre combien il visait haut pour lui et Orlando ricanait. Lui-même n’avait jamais eu de véritable lien avec son géniteur. Il le connaissait parfaitement pour l’avoir vu à plusieurs reprises mais il n’avait pas tenté d’aller plus loin puisque cela l’intéressait tout autant que dans l’autre sens. Desmond n’avait pas regretté le départ d’Arlene, visiblement, et Orlando ne regrettait pas de n’avoir pas connu cet homme irresponsable qui lui servait de père. La seule chose qu’il gardait de lui était visiblement son sourire et c’était amplement suffisant aux yeux du musicien.
Il ne fallait pas croire qu’Orlando aurait pu être dérangé par tout le tintamarre qui régnait dans la pièce voisine. Sa mère devait certainement être occupée à rassembler le peu de talent de cuisinière qu’elle avait pour préparer un repas digne d’un roi. Ce n’était pas étonnant, Arlene était une femme à garçons, il était donc tout à fait normal qu’elle se coupe en quatre pour ses deux fils adorés. Il était parfois arrivé à Orlando de plaisanter en demandant ce qu’elle aurait fait si elle avait eu des filles et à la grimace qu’il avait reçue comme réponse, il avait compris. Arlene aimait parler, elle était volubile, intense, pleine d’humour et avait la réplique facile. Il n’y avait que les hommes pour apprécier ces caractéristiques. Pour le reste, les femmes voyaient ce type de comportement d’un mauvais œil, critiquant à tout va en prétextant qu’Arlene Delcourt avait besoin de séduire pour se sentir exister. Ce n’était pas tout à fait faux, mais Orlando savait qu’il y avait beaucoup plus derrière cela. Une enfance à l’éducation stricte, l’interdiction de voir des garçons et la bêtise d’une vie que cela avait entrainé, immanquablement. Quand on conseille quelque chose à Arlene, on peut être sûr qu’elle fera tout l’opposé. Orlando ne tenait pas vraiment cette prédisposition de sa mère. Il lui arrivait d’aller à l’encontre de la bienséance selon certains habitants mais c’est davantage parce qu’il s’était forgé ses propres principes que par volonté de les contrarier.

« Orlando ! »

Cette fois, la porte s’ouvrit en grand et la délicieuse odeur d’une tarte ratée envahit la chambre du jeune homme. Il feignit le sommeil profond mais c’était sans compter sur la ténacité maternelle et la tendance qu’elle avait à venir lui arracher ses couvertures s’il n’obéissait pas en temps voulu. Heureusement qu’il avait repris ses bonnes vieilles habitudes de dormir en bas de pyjama, pensa Orlando alors qu’il sentait la fraicheur caresser sa peau dénudée, lui qui avait pris l’habitude de dormir nu se serait trouvé en bien mauvaise posture s’il n’avait pas pensé à enfiler quelque chose avant de se vautrer dans son grand lit. Un frisson lui parcourut le dos mais il resta immobile, bien décidé à ne pas lâcher prise et lorsqu’Arlene lui asséna une claque sur le derrière, il marmonna entre ses dents, lança maladroitement son oreiller qui n’atteint pas sa cible et se laissa retomber sur le matelas, ce qui était nettement moins confortable.

« Si tu ne te lèves pas maintenant, tu vas être en retard pour aller chercher ton frère. »
- Qu’il vienne à pied, riposta Orlando tout en sachant que jamais il ne laisserait son frangin dans cette mauvaise posture.
« Hors de question. Tu te lèves, tu enfiles une de tes tenues puantes, empoignes tes clefs de bagnole et file ! »

Il ne répondit pas et elle n’attendait pas qu’il le fasse de toute façon. Quand elle quitta la pièce, elle savait que son ainé ne tarderait pas à suivre, avec son air chiffonné et sa fausse moue renfrognée. Il fallut cependant encore quelques minutes à Orlando pour se lever et s’asseoir sur le bord de son lit. Il se frotta les yeux un moment, bailla à s’en décrocher la mâchoire puis se releva finalement, traversant la pièce pour s’approcher de ses vêtements, soigneusement repliés par sa mère et posés sur le dossier d’un petit fauteuil dans lequel il aimait se vautrer pour jouer des mélodies tout droit sorties de son esprit. Il ne chercha pas à mettre quelque chose de propre, son frère le connaissait suffisamment pour s’accommoder d’un t-shirt et un pantalon froissés. Il se passa machinalement les doigts dans les cheveux puis finit par émerger de sa pièce préférée, guidé par le parfum de pancakes – la seule chose qu’Arlene semblait réussir à chaque coup.

« B’jour… » marmonna-t-il en prenant place à la table sur laquelle trônait un amas d’ustensiles de cuisine.

Ce fut tout juste si Arlene réagit, poursuivant ses multiples tâches sans jeter un regard à son premier né et quand celui-ci demanda après des pancakes, la seule réponse qu’obtint le musicien fut la suivante :

« Va chercher ton frère. Quand tu l’auras ramené en un morceau ALORS tu auras des pancakes ! »

(…)


C’était sans compter sur la nuit agitée qu’il avait eue, à draguer les jolies serveuses du Dukes et à faire tourner en bourrique Victoria avant d’abandonner Ruby Creek Falls pour rejoindre sa belle des champs. Temperance et lui avaient passé la fin de soirée à se chamailler, comme d’habitude et pour une fois, ils n’avaient pas terminé la nuit à moitié dénudés. Il y avait bien des façons de s’amuser et Orlando l’avait une fois de plus prouvé en faisant ronronner la chirurgienne sans jamais dépasser le stade des baisers et des caresses. L’excuse Adrian était revenue, une fois de plus et Orlando n’avait pas été à l’encontre de son désir de rester sage. Il l’avait quittée vers trois heures du matin, reprenant le volant, un peu éméché, comme souvent, pour retrouver son propre lit une demi-heure plus tard. Au final, il n’avait pas eu suffisamment de repos et sa tête s’en faisait ressentir. Dès midi, il aurait retrouvé une forme olympique mais entre-temps, il comaterait jusqu’à l’arrivée de Gaël et le parking désert, non loin de la gare, était l’endroit idéal pour s’arrêter et piquer du nez. La preuve : dès qu’Orlando eut coupé le moteur et croisé les bras sur son torse, il avait fermé les paupières et avait laissé la torpeur l’envahir pour le plonger dans un état de somnolence qui lui suffirait sûrement pour la journée.
Sa sieste dura en tout et pour tout une demi-heure, mais cela lui parut bien plus parce qu’il s’éveilla en sursaut – il n’aurait pas su dire si c’était dû à ce qu’il se tramait dans son rêve, dont il ne se souvenait d’ailleurs plus, ou parce que sa conscience l’avait rappelé à l’ordre, « n’oublie pas ton frangin ! ». Ses yeux d’un bleu délavé mais d’une vivacité peu commune pour un garçon à l’air si débraillé circulèrent. Il regarda le siège voisin vide avec un air paumé, comme s’il essayait de remettre les choses à leur place puis lorsqu’il leva les yeux vers le cadran qui surplombait le compteur, il vit que cela devait faire dix minutes que le bus devait être arrivé. Machinalement, il mit le moteur en route et reporta son attention sur la gare, située à une centaine de mètres de là. Il était impossible de s’y méprendre : c’était bien la silhouette d’un car qu’il voyait au loin et il démarra en trompe en jurant contre sa bêtise, si maladroitement que le moteur cala et qu’il donna un coup sur son volant. Il attendit deux secondes et reprit à zéro. Cette fois, il put démarrer sans problèmes et il se dirigea vers la gare, préparant déjà un tas d’excuses qui ne serviraient à rien, il le savait parfaitement.
Comme il approchait du point de rassemblement Orlando plissa les yeux et guetta la forme familière de son frère cadet mais sa vue était un peu trouble, probablement à cause de la fatigue qui s’était accumulée. Si sa mère lui avait servi ses fameux pancakes, il aurait peut-être pu se réveiller complètement et avoir l’air moins dépareillé mais voilà, Arlene n’en avait que pour son cadet et, loin de rendre Orlando jaloux, cela lui donnait ce sentiment de tendresse qu’il n’éprouvait qu’à l’égard de Gaël. Même Virginia ne lui inspirait pas ce genre de sensation. Elle était bien trop intense et emmerdeuse pour qu’il en vienne à ressentir ce genre d’émotion. Gaël… c’était Gaël, le petit frère dont il avait toujours rêvé et même s’il ne partageait qu’un parent avec celui-ci, c’était comme si leur famille ne se résumait qu’à leur trio : leur mère complètement illuminée, et eux deux, avec leur complicité illimitée et leur insatiable besoin d’être plus que des frères de sang. Gaël devait bien être la seule personne à pouvoir se targuer de connaitre Orlando sur le bout des doigts. Lui seul savait quand Orlando était agacé, malgré le sourire que celui-ci arborait en tout temps. Maintenant que les mètres qui le séparait de ses retrouvailles avec Gaël se réduisaient, Orlando réalisait à quel point il était heureux de ravoir son cadet en ville. À deux, ils allaient jouer les terreurs de Ruby Creek Falls. Cette simple perspective arracha d’ailleurs un sourire complètement puéril au jeune homme. Sa quête de la silhouette de son frère ne fût interrompue que parce qu’un petit groupe s’apprêtait à traverser. La légère frustration qu’Orlando ressentit à devoir ralentir fut bien vite oubliée : à voir les jolies jambes qui s’exhibaient devant lui, le teint hâlé, les muscles parfaitement dessinés son la peau de satin, il en oublia presque la raison de sa venue. Lorsqu’il vit qu’elle rejoignait un type dans la force de l’âge, il grimaça et termina son avancée, repérant sans mal le jeune homme qui se tenait à quelques mètres de là, flanqué de sacs et autres objets encombrants. Manœuvrant pour venir se garer sur le passage initialement réservé aux bus, Orlando adressa un clin d’œil à son frère et sortit du véhicule, revigoré à la vue de son frangin.
On pouvait bien dire qu’Orlando était ému de revoir son cadet même si rien dans son attitude ne le laissait présager. Gaël devait bien le sentir, malgré la nonchalance dont faisait preuve son frère et malgré le sourire en coin qu’il arborait, désinvolte. Cela faisait plus d’un an qu’ils ne s’étaient pas vus, Orlando n’avait même pas eu l’occasion de lui rendre une petite visite pendant son road trip tant l’étudiant semblait pris par ses études – et puis, il fallait bien l’avouer, il n’avait pas envie de se prendre des remarques de la part de Costigan senior alors les deux trois jours qu’il avait passés à New York, il les avait utilisés à sa manière, de son côté, laissant son frère à sa vie d’universitaire. Jusqu’à ce que Gaël ne quitte Ruby Creek Falls pour étudier, ils n’avaient jamais été longtemps séparés et c’était uniquement par la faute de James si Orlando avait chaque fois vu son frère disparaitre, soit pour des vacances avec les Costigan, soit pour aller s’ennuyer dans des auditoires bondés. Il n’avait évidemment aucune idée que Gaël avait pris un nouveau tournant et s’il l’avait su, il était certain qu’Orlando n’aurait pas caché son admiration. Il fallait bien l’avouer : jamais il ne s’était imaginé une seule seconde que Gaël oserait emprunter cette voie. Désobéir, échouer face aux attentes parentales, c’était le lot d’un Compton, pas celui d’un Costigan. En attendant tout ce à quoi pensait Orlando à cet instant précis c’était ô combien son frère avait la classe, avec sa tignasse en bataille et ses lunettes hors de prix – Orlando avait beau n’avoir jamais été très porté sur la mode, il devait bien avouer que son cadet avait l’air d’une véritable petite star du cinéma, comme quoi les gens évoluaient vite une fois plongés dans un autre cadre de vie ! Mais ce n’était pas pour déplaire à Orlando. Jamais il ne remettrait en cause un changement chez son frère.
Quand la remarque fusa, Orlando éclata de rire, secoua la tête mais ne répondit rien, toujours occupé à apprécier le changement notoire de Gaël. Ils se dévisagèrent un instant, Orlando attendit de voir si son frère allait faire un pas vers lui, tenter de l’étreindre. Après tout, ils n’avaient pas eu vraiment besoin de le faire jusque-là, n’ayant jamais été séparés au point de ressentir ce besoin, mais là, la situation était bien différente. Lorsque Costigan s’avança vers lui, Orlando ouvrit les bras et le serra contre son cœur, fermant un instant les yeux. Il n’avait pas l’habitude de ce genre de contact, aussi apprécia-t-il doublement la chaleur de Gaël, son parfum familier. Lorsqu’ils se séparèrent au bout de quelques secondes, Orlando ne le laissa pas s’éloigner trop, posant les mains sur ses épaules pour l’observer de haut en bas, comme pour l’évaluer. Finalement, il laissa échapper ce qui lui était venu à l’esprit depuis qu’il avait découvert la nouvelle version de son cadet :

« Mec, elles vont toutes être folles de toi ! Tu vas me faire de l’ombre, j’vais être jaloux ! »

Il faillit faire une réflexion supplémentaire, sur le fait qu’il en connaissait au moins un qui n’allait plus savoir se tenir, mais il s’en abstint, il ne s’était jamais vraiment mêlé des histoires de son frère, encore moins celle qu’il avait eue avec un garçon de Ruby Creek Falls. Non pas que ça le gêne que Gaël aime les deux sexes, mais il avait tout simplement l’impression que ce n’était pas sa place de commenter cette partie de sa vie privée. Il conclut ces retrouvailles d’un geste désinvolte, ébouriffant la chevelure blonde de son cadet avant de se pencher pour attraper une partie de ses affaires.

« Allez, trainons pas, j’ai pas eu droit aux pancakes, c’matin, moi. Tout ça parce qu’elle voulait être sûre que je te récupérerais à la gare. Pour qui elle me prend, franchement ? »

Ils avaient atteint la voiture et Orlando fourra les affaires de Gaël dans le coffre avant de rejoindre sa place au volant. Lorsqu’il fut certain qu’ils n’avaient rien oublié, il remit le moteur en route et fit le tour de la gare, reprenant la direction de Ruby Creek Falls.
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